Sombres records

Rédigé le 25/04/2024
zinfos974

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(Au moins 4 assassins de 14 à 18 ans en moins de 4 ans à La Réunion)

Dans cette société, cette humanité plus que troublée, il serait mal venu de critiquer une décision de justice et, ceci d’autant plus que c’est elle qui reçoit de plein fouet toutes les conséquences de ces troubles.

Mais l’affaire est ahurissante et semble laisser sans voix la plupart des commentateurs. On les comprend. Mais dans le même temps, ne pas tirer des enseignements, des leçons, à défaut de conclusion, semble également criminel. Les enfants sont notre avenir à tous et les dérives du monde des enfants, sont un signe d’alerte que l’on ne peut ignorer. Rappel des faits :

1 – Affaire Djayan : En mai 2019 à Ste Marie, un garçon de 18 ans tente d’assassiner une élève de sa classe âgée de 17 an.

2 – Affaire Morgane : En avril 2022 à St Pierre, un garçon de 15 ans tente d’assassiner une jeune fille de 14 ans.

3 – Affaire Shana : En septembre 2023, à Pierrefonds, une jeune fille de 14 avec la complicité d’un garçon de 16 ans, assassine une jeune fille de 16 ans.

Ces 4 personnages, Dieu merci, sont des exceptions, des cas limite. Mais la vie est ainsi faite, que les situations extrêmes sont des indices, des signaux. Au-delà des sanctions qui, bien entendu doivent être exemplaires, je me demande, en tant que médecin, si la société est capable, comme l’industrie, de comprendre le message sociétal et de régler ces « non-conformités » pour que ce genre d’accidents et de drames ne se reproduisent pas. Les prisons françaises n’ont jamais connu une telle affluence, nous dit-on. N’est-ce pas, parce que la société française se montrerait incapable de prendre les mesures nécessaires pour que les incivilités et les crimes se réduisent ? Nous semblons tous être noyés dans une sorte de brouillard nous empêchant de voir la réalité en face. La vraie culture a déserté l’école. Il n’y a plus de curiosité chez les enfants ou une curiosité détournée par le manque de réponses de la société et/ou de l’école. Tout est aseptisé, mâché, lissé et finalement fort indigeste. Alors, à la recherche désespérée de la vraie vie, on se tourne vers l’artificiel. Mais cela ne suffit pas. Ils ne sont pas idiots ces petits, ils savent bien que la vraie vie c’est autre chose. Il suffit de pousser le bouton de la télé pour voir des horreurs, vraies comme les guerres ou fictives comme les films d’horreur dont ils raffolent. Parce que l’on n’a pas su répondre à leurs vraies questions, ils vont chercher n’importe quelle réponse, y compris les pires. L’éveil des sens chez les ados est une bombe dont on ne se méfie pas assez. Sous la couverture étanche du mépris des adultes, couve ce feu de la vie. La pression des frustrations augmente donc et peut finir par exploser. « Vous n’avez pas compris mon envie de vivre, alors je vais jouer avec la mort, pour voir ». Il s’agit là d’une vision un peu facile, mis comment comprendre, comment expliquer autrement cet accès de furie incompréhensible ? Tout ce que l’on trouve dans le web, notre bibliothèque mondiale, à ce sujet, relève d’une approche puritaine, très lisse, à la limite du politiquement correct, et très éloigné de ce qu’attendent nos enfants à cette époque de leur vie. Certaines régions du Monde sont un peu plus avancées, mais encore loin du compte. Voici ce que nous dit le Directeur d’une agence de santé canadienne : « Sur le point d’entrer à l’école secondaire, les enfants âgés de 10 à 12 ans vivent les premières étapes de la puberté : alors qu’ils voient leur corps et celui de leurs camarades se transformer, ils développent de nouveaux intérêts et ont davantage envie de plaire, tout en devenant plus sensibles à la pression des pairs ».  A chaque étape de l’initiation proposée par le dossier pédagogique de cette Agence de Santé, il est prévu de demander leur avis aux enfants et il leur est suggéré de poser toutes les questions qui leur viennent à l’esprit. Là est sans doute l’originalité de cette démarche. Dans d’autres pays comme la Finlande, réputée pour la qualité de son enseignement, on n’hésite pas à préparer nos bambins à ce qui les attend à l’âge adulte, dès 3 ou 4 ans ! Il ne faut tout de même pas oublier que, du stade du « pipi caca » au stade du sexe « copulateur, reproducteur et sensuel » il y a un gouffre bien difficile à combler, même en commençant la préparation dès l’âge de 3 ans. Enfin, il faut bien admettre également que l’urbanisation a écarté de plus en plus nos enfants, de la présence enrichissante de la nature à laquelle avaient droit les enfants des agriculteurs qui ne représentent plus aujourd’hui qu’une infime minorité de la population. Tous ces facteurs négatifs expliquent en grande partie les dérives sociétales vers l’artificiel et le déséquilibre. Les plus faibles (les enfants) en sont les premières victimes. Sans prise de conscience de ces phénomènes sociétaux et sans mesures correctives efficaces, il sera bien difficile d’enrayer cette évolution délétère.

Ma conclusion : Il n’existe pas d’école des parents. Cela est fort regrettable, il faudrait peut-être commencer par là. L’éducation sexuelle à l’école est une foutaise. Il s’agit d’une approche des comportements humains en toute circonstance qu’il faudrait aborder dès le plus jeune âge car les modèles ont disparu devant la prolifération des comportements déviants, trop souvent montés en épingle. Il faut donner aux enfants des repères. Le bien, la sagesse, la sérénité, ont déserté les villes et les écrans envahis par la folie des grandeurs et du toujours plus. Revenir aux fondamentaux et aux lois de la nature, est sans doute une piste à explorer.

Docteur FOLAMOUR

Références :